COMMENT FAIRE CHANGER LES GENS ALORS QUE LA FIN DU MONDE APPROCHE?

Ce week-end, j’étais top grugru.

Déjà, je suis allé voir au cinéma « moi, daniel blake », le dernier film de ken loach. Alors ok, on peut dire que j’étais conquis d’avance car dans le genre « cinéaste top chouchou », ken loach trône très haut dans mon panthéon personnel. Et puis le sujet me concernait directement parce que, rappelons le pitch, il s’agit de l’histoire d’un mec qui se retrouve au chômage. Donc, je me doutais que j’allais aimer ce film mais ce dont je me doutais moins, c’est que j’allais pleurer comme une madeleine pendant les 3/4 de la projection (oui le renardeau a une âme sensible). Tout le long du film, je n’arrêtais pas de me demander : pourquoi les gens n’aident pas daniel blake ? Pourquoi, quand il tague le mur du pôle emploi, les gens se contentent de rigoler, de le prendre en photo et d’applaudir, mais personne ne s’oppose à son arrestation quand la police arrive ? Pourquoi, à chaque échelon de la société (vigile du supermarché, conseillère du pôle emploi), chacun joue le rôle qui est attendu de lui, exerçant la domination à son échelle, terrorisé à l’idée de perdre sa place ? Alors qu’il suffirait de créer des alliances pour que le monde change ?

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Sinon dans la catégorie « mais que font les gens alors que tout va mal ? », j’ai aussi écouté une émission d’hors-série avec Pablo Servigne. Oui l’accès est payant (comme d’hab) mais vous pouvez trouver tout un tas d’autre émissions feat. Pablo Servigne un peu partout sur internet alors faites pas genre cela est hors de votre portée. Pablo Servigne c’est qui ? C’est un mec qui a écrit un bouquin intitulé « comment tout peut s’effondrer ». Donc ça parle de l’effondrement de notre civilisation (au sens civilisation industrielle dépendante des énergies fossiles). C’est un peu angoissant mais aussi terriblement nécessaire. De toute manière que vous le vouliez ou non, il y a de grandes chances qu’au cours de votre vie vous viviez ce fameux effondrement, donc autant commencer tout de suite à vous y préparer au lieu de vivre avec des œillères et de vous persuader que l’innovation technologique nous sauvera de la catastrophe.

Et donc, tout ceci nous amène à une question que je me pose tout le temps : comment les gens peuvent-ils continuer à vivre comme si de rien n’était alors que nous vivons à une époque où une crise majeure (économique, sociale, environnementale) se prépare ?

Deux solutions.

  1. les gens savent mais s’en foutent (c’est l’attitude « boire du champagne sur le titanic qui coule »)
  2. les gens ne savent pas.

Je vous propose de laisser un instant de côté la catégorie des « gens qui savent mais s’en foutent » (si vous voulez mon avis, l’histoire leur réglera leur compte tôt ou tard – remember marie-antoinette et son « s’ils ont faim, qu’ils mangent de la brioche ») et de réfléchir aujourd’hui tous ensemble à la question suivante : comment sensibiliser les « gens qui ne savent pas » aux enjeux cruciaux pour la survie de notre société, sans leur faire peur et les faire basculer dans la catégorie des « gens qui savent mais s’en foutent » ?

Il est évident que 99 % du temps, je suis la mauvaise personne pour m’attaquer à ce combat crucial (en effet, tel le militant de la manif pour tous ou l’écolo décroissant qui vit tout nu dans sa yourte, je cède souvent à la tentation d’asséner mes arguments à coup de gourdin quand quelqu’un n’est pas d’accord avec mon point de vue).

Or, tout le monde le sait, les gens sont susceptibles (et surtout les blogueuses mode). Face à la critique, ils vont bouder dans leur coin et après c’est un casse-tête sans fin pour les faire sortir de leur grotte et pouvoir à nouveau discuter avec eux.

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souvent une boite de thon dissipe tous les malentendus

Alors, comment convaincre sans crisper ? Pour vous, lecteurs fidèles, j’ai élaboré trois stratégies :

a) la technique « Guillaume Meurice », plus connue sous le nom « d’argumentation par l’absurde ». En gros ça consiste à ne pas dire « non » à l’autre quand il sort un argument débile mais au contraire de dire « ah oui ! » et dérouler la suite logique de l’argument, à savoir les implications sur le monde réel (indice : ça marche hyper bien avec les mecs de droite qui pensent que le patronat c’est hyper cool). Après, le risque avec cette technique, c’est évidemment la condescendance, d’où le choix crucial des cibles. Attaquer les pauvres en se foutant de leur gueule parce qu’ils votent FN, c’est plus de l’humour, c’est du mépris de classe. Ne vous trompez pas de cible : l’humour oui, mais d’abord contre les puissants !

b) deuxième technique : le débat argumenté. Le problème, c’est que beaucoup de gens se lancent dans des débats sans s’y être assez préparés. Combien de fois vous êtes vous retrouvés dans cette impasse qui consiste à demander à votre interlocuteur de vous croire sur parole ? (et quand il vous demande des chiffres, des preuves réelles de ce que vous avancez quoi, vous bafouillez un ridicule « je l’ai lu sur internet »). On veut des SOURCES, des faits en béton, merde. Si une cause est importante pour vous, travaillez votre argumentaire. Soyez préparés à toutes les questions possibles et essayez de vous en tenir à la rationalité scientifique sans partir dans les aigus (combien de débats se sont terminés par le fameux « au temps de la préhistoire les humains vivaient comme ça DONC il me paraît logique que ce mode de vie est plus naturel que les autres ». stop à la théorie de l’évolution pour tout et n’importe quoi, ne tendez pas les bâtons pour vous faire battre, merde). Et de grâce, restez calme. Utilisez les principes de la communication non violente. Comme dirait renard-mère, un animal énervé, qui montre les dents, est un animal en situation de détresse. Plus tu montres de l’agressivité, plus ça veut dire que tu perds du terrain et donc c’est désastreux pour ton image : c’est toi qui passes pour l’excité du bulbe extrémiste, aux idées irréalistes.

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moi quand je rentre à la maison et que je me mets à table

c) troisième technique : la théorie de l’exemplarité. Pourquoi vous croyez que le mot « décroissance », en France, suscite systématiquement des sourires condescendants ? Parce que pas mal de gens qui défendent cette cause sentent des pieds. Imposez-vous une hygiène de vie et une morale irréprochable. Si les autres considèrent que vous avez une vie cool, que vous êtes quelqu’un de fiable, de confiance, qui prend de bonnes décisions, ils auront tendance à écouter ce que vous avez à dire. Si au contraire vous dégagez une haleine fétide et que vous vous effondrez, essoufflé, à chaque fois que vous montez 4 étages, personne n’aura envie de mener la même existence que vous et d’écouter votre philosophie de vie. Le changement c’est maintenant comme dirait l’autre, mais c’est d’abord sur soi qu’il faut l’accomplir avant de pouvoir prétendre toucher les autres (ce qui nous amène au point tant controversé de l’engagement humanitaire : selon moi, il est ridicule de prétendre sauver la planète et les petits enfants en afrique quand soi-même on nage dans des tonnes de problèmes psychologiques & relationnels)

d) quatrième technique : la propagande. Vous êtes nul en débat ? Votre humour est à chier ? Vous êtes incapable de rester calme quand vous parlez d’un sujet qui vous passionne? Une seule solution s’offre à vous : faire découvrir aux autres les sources de votre pensée… directement à la source. Vu que vous, de toute évidence, n’arrivez jamais à retranscrire correctement ce que vous avez lu ou vu. Donc : forcez votre entourage à lire les livres qui vous ont marqué, abonnez votre famille de force aux journaux qui vous passionnent, offrez des dvd militants, et surtout, crevez la bulle de confort de tout le monde en introduisant du réel dedans, et des expériences.

Alors après je sais que vous allez me dire : « t’es bien gentil avec ton militantisme, mais même si les gens finissent par t’écouter poliment ça va changer quoi ? l’instant d’après ils seront repartis dans leur petit train-train quotidien et ça aura servi à rien au final ». Hé bien détrompez-vous. On ne peut JAMAIS savoir l’impact qu’on peut avoir sur la vie des gens. Parfois, vous dites un truc à quelqu’un, il s’énerve ou alors il ne réagit pas, vous vous dites « cette personne est hermétique à mes arguments » alors qu’en fait l’idée fait son chemin, souterrainement, à la manière d’une graine. Ne sous-estimez jamais votre capacité à influencer les autres. Si des blogueuses mode parviennent à vous faire acheter des vêtements moches fabriqués en Chine sous prétexte que « ce top est magnifique », alors tout est possible. Plantez des graines dans les esprits des gens !

Allez bye

16 commentaires
  1. Ouais a dit:

    Madame la blogueuse de mode est susceptible!!!? Alors pourquoi rédiger un blog de mode bordel? Pour vous soigner par le mal?

    Ironie avec tout le monde! Et que ça plaise ou non. De toute façon qui écoute qui hein?

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    • renardeau a dit:

      mais non je ne vous boudouche pas 😀 je me suis installé un nouveau stop internet qui marche du feu de dieu!

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      • Ouais a dit:

        Quelle idée! 🙂

        Et c est quoi votre trucstoppeur?

        Ben moi j aime bien avoir tes réponses, les silences de blogueurs ressemblent trop souvent à la chasse d eau non tirée par mépris dans les gares.

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  2. Samar a dit:

    La théorie de l’exemplarité est ma préférée. J’ai passé 2016 dans les cabinets de praticiens très très alternatifs et si tu veux la meuf qui prétend t’aider à résoudre tes problèmes alors qu’elle pue le stress et l’angoisse bah lui accordes 0 crédit. Beaucoup n’incarnaient pas ce dont ils faisaient la promo. Donc maintenant je n’écoute plus les gens j’observe leur façon d’agir. Et de mon côté j’arrête de prêcher et j’essaye d’être à peu près équilibrée.
    Sinon toi t’as l’art d’aller choper des blogueuses de haute volée pour illustrer tes propos, bravo!

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      • Ouais a dit:

        Je note que vous me boudouchez!
        Je n ai même pas le droit à une réponse d insulte!!!!:d

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      • Samar a dit:

        Pire que ça si tu savais. C’était du level marabout de Barbès, mais jsuis au top maintenant je vais pouvoir trouver les numéros du loto avec mes nouveaux pouvoirs énergétiques.

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  3. j’ai été touchée par l’article. en vrai. petit câlin virtuel.

    après, je reste fondamentalement assez peu convaincue des vertus du débat avec des gens ayant des vues diamétralement opposées aux nôtres, à part éventuellement le coup de la valeur de l’exemple.

    bon et sinon j’ai pas trop compris le concept du site un invincible été, que je connaissais pas, à part que je japperais de bonheur à avoir autant de commentaires tropgénialhihihi sur un article, la vérité ça doit faire plaisir (mais bon à propos d’articles qui ont dû prendre 17.000 heures à écrire au prix d’une grosse activité enculage de mouches, certes n’est-ce pas l’apanage des blogueuses en général et de moi en particulier, ouais mais quand même à ce point ça relève du prodige)

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    • renardeau a dit:

      (non mais nous sommes tous jaloux de l’unanimité que soulève cette personne pénible)

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  4. Caroline a dit:

    J’aime beaucoup l’idée de ne pas savoir quel impact on a sur les autres. Et la question de l’exemplarité, hein… je suis d’accord avec Samar, le praticien alternatif mal dans sa peau (ça me rappelle un centre de hippies où les gens étaient toujours très stressés par les horaires de méditation…).

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  5. aubepine a dit:

    Moi aussi, j ai beaucoup de mal à comprendre la résignation des gens (je ne m’exclue pas du lot, ça dépend des situations)

    Est-ce lâche d’avoir résolu la question du débat en l’esquivant tout simplement? Ce que je veux dire c’est que parmi mon entourage très hétérogène (mon dernier e-mail t’en auras peut être convaincu;-) je me suis souvent demandée comment réagir lorsque, au détour d’une conversation, un sujet sensible etait amorcé mais non lancé officiellement en mode « je déclare le débat ouvert » (ca va du petit ami d’une telle qui fait des blagues raciste/homophobes à répétition à la discussion des gens de droite sur les salariés qui ont un poil dans la main et tous ces chômeurs patatipatata, à ceux qui ne comprennent pas à quoi sert ce que je fais (et ton job, à quoi ça sert? – qu’est ce que ça me démange) ou des choix de vie que je pourrai dezinguer en un clin d’œil quand on cherche à me les faire miroiter, etc. Meme que j’ai une cousine de mon âge qui vit aux us et soutient Trump.. Et bien: je ne discute pas, j’esquisse quelques arguments polis où je dis que je ne suis vraiment pas d’accord et qu’on va peut être passer à autre chose sinon ça risque de mal finir )

    Je crois qu il me faudrait des heures et des heures de CNV pour réussir à créer un débat qui ne finisse pas sur une attaque as hominem, une brouille, une réaction de mépris de ma part, etc.
    Comme ca m’est insupportable quand les gens me font subir dans une discussion leurs avis (cf mes exemples ci dessus), je me dis que la réciproque serait la meme. Donc, à moins d’embrasser la carrière politique, on ne peut que débattre avec des gens qui ont un minimum d’idées en commun avec les siennes ou bien qui assument de débattre.

    Je pense aussi que le débat d’idées abstrait ne change pas les gens (meme l’effondrement du monde c’est abstrait). Et que sur beaucoup de sujets, j’aurai beau dire, je resterai 1) la parisienne aux mœurs bizarres (pour ceux qui ne sont pas de Paris) 2) l’intello de service en marge de la « vraie » vie 3) une bobo pour ceux qui ont une vie culturelle à minima. Donc tout ce que je dis ne peut que etre catalogue « bobo parisien intello » (triple pléonasme). Comment expliquer à un entrepreneur « qui se tue au boulot et aimerait payer plus ses salariés plutôt que d’entretenir les assistés de France et de Navarre » que « y a pas que le travail dans la vie »? Dès que ca touche à des valeurs, ça devient ultra tendu d’essayer de convaincre l’autre

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    • aubepine a dit:

      en fait, mon commentaire est hors de la plaque puisque tu parles des gens qui ne savent pas, pas de ceux qui croient savoir.

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      • renardeau a dit:

        bah après malheureusement oui, je pense qu’il faut que les gens voient les choses de leurs yeux pour commencer à y croire. dans l’itw de pablo servigne à un moment il dit que les gens ont plus peur en voyant une mygale qu’en lisant un rapport du GIEC sur les effets du réchauffement climatique (alors que c’est complètement irrationnel: il y a par exemple un scénario du GIEC qui explique que si le permafrost fond et que tout le gaz accumulé pendant des milliers d’années se dégage dans l’atmosphère l’humanité s’éteindra à coup sûr…)

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  6. Ouais a dit:

    Dites, au lieu d arrêter le web vous feriez mieux de le savourer à petite dose Madame Re(commu)nardeau!

    Pour une fois qu on a une blogueuse de mode un petit peu de gauche à gauche!!!!!

    Vous faites chier hein!!!

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    • renardeau a dit:

      bah ouai mais il faut que je m’acquitte de mes taches de femme au foyer aussi! je peux pas être sur internet tout le temps! qui va nettoyer les wc et faire des salades rapées après?!

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      • Ouais a dit:

        Lui!

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