LISTE DE LIVRES POUR ÊTRE MOINS CON CETTE ANNÉE

tumblr_nioaraOhan1rarw77o1_500Je sais pas vous mais moi j’en ai marre et j’ai envie d’être en vacances là.

Malheureusement, demain c’est lundi.

Ô RAGE Ô DÉSESPOIR Ô TRAVAIL ENNEMI

N’AI-JE DONC TANT VÉCU QUE POUR TRIER DES FICHIERS EXCEL?

…afin de se changer les idées, voici donc une liste de livres (oui, encore) à lire pour être moins con. Je sais que c’est un peu facile comme ligne éditoriale pour ce blog mais comme dirait l’autre vous ne savez pas ce que vous ratez (comme idées de thèmes à aborder sinon j’ai: les brosses à dents électriques, les exémas vaginaux, Patricia Kaas et la recette du civet de sanglier).

1507-1Je n’aurais sûrement jamais lu ce livre sans les conseils de gros Aubépine, et autant vous dire que ça aurait été dommage [ce qui me fait penser (attention hashtag larme à l’œil) que même si le lectorat de ce blog frôle parfois le zéro pointé, vos commentaires sont COOL, m’apprennent des trucs et réjouissent mon cœur de midinette. Donc MERCI]. Mais revenons à Didier Eribon. Je le reniflais de loin depuis un bon bout de temps mais n’osais m’en approcher car la lecture des livres de son fils spirituel, Edouard Louis, m’avait traumatisé. Je n’aurais pas dû faire autant de chichis, parce que retour à Reims est beaucoup moins axé « anecdotes personnelles crado » qu’il faut en finir avec Eddy Bellegueule (point de descriptions de sodomies familiales en nord-pas-de-calais). C’est un livre assez pudique, digne et beau, dans lequel Didier Eribon parle de son homosexualité, de la trajectoire politique de sa famille (du vote pour le parti communiste au vote FN), de son attraction / répulsion pour le monde ouvrier dont il est issu, du mépris et du désintérêt des classes dominantes pour les problèmes de pauvres, de la rigidité de la société. Bref, un super livre de sociologie (que je vous recommande chaudement même si vous êtes un vieux ronchon et que vous n’aimez pas les bourdieuseries).

« Il me semble incontestable que l’absence du sentiment d’appartenir à une classe caractérise les enfances bourgeoises. Les dominants ne perçoivent pas qu’ils sont inscrits dans un monde particulier, situé (de la même manière qu’un Blanc n’a pas conscience d’être blanc, un hétérosexuel d’être hétérosexuel). Quand on évolue dans les milieux bourgeois ou simplement dans la moyenne bourgeoisie, on est souvent confronté à la présomption d’être l’un des leurs. De même que les hétérosexuels parlent toujours des homosexuels sans imaginer que ceux à qui ils s’adressent pourraient bien appartenir à l’espèce stigmatisée dont ils se moquent ou qu’ils dénigrent, de même les membres de la bourgeoisie parlent à ceux qu’ils fréquentent comme s’ils avaient traversé depuis toujours les mêmes expériences existentielles et culturelles qu’eux. Ils ne s’aperçoivent pas qu’ils vous agressent en le supposant (même si cela vous flatte et suscite en vous, car il a fallu tant de temps pour y parvenir, la fierté de « passer » pour ce que vous n’êtes pas: un enfant de la bourgeoisie). Je ressens toujours de la gène, voire de la haine, lorsque j’entends autour de moi parler avec mépris ou désinvolture des gens du peuple, de leur mode de vie, de leurs manières d’être. Après tout, c’est de là d’où je viens. Et de la haine immédiate devant l’hostilité que les nantis et les installés expriment en permanence à l’égard des mouvements sociaux, des grèves, des protestations, des résistances populaires. Certains réflexes de classe subsistent malgré tous les efforts pour se changer soi-même. Et, s’il m’arrive de me laisser aller, dans la vie quotidienne, à des regards ou à des jugements hâtifs et dédaigneux qui ressortent à une perception du monde et des autres façonnée par ce qu’il faut bien appeler un racisme de classe, les propos péjoratifs sur la classe ouvrière tenus par les gens que je côtoie dans ma vie d’adulte et qui constituent désormais le milieu auquel j’appartiens m’atteignent encore comme si c’était moi qui était visé en même temps que mon milieu d’autrefois. Chaque fois que je suis « infidèle » à mon enfance, en prenant part à des jugements dépréciatifs, une sourde mauvaise conscience ne manque jamais, tôt ou tard, de se manifester en moi ».

413JHCc6rAL._SX280_BO1,204,203,200_Le Nord-Pas-de-Calais qui vote FN en masse: en voilà une transition fantastique pour le livre ci-dessus. Si vous êtes des lecteurs assidus du Monde Diplomatique, cet ouvrage est sûrement votre bible de chevet mais pour les autres: ne vous découragez pas face à la taille du machin (essai de 350 pages sur la vie politique américaine) et lancez-vous. Ce livre répond de manière claire, précise à argumentée à la question qui agite les mammifères à l’approche des présidentielles de 2017: pourquoi les pauvres votent à droite alors que normalement c’est contre leur intérêt de le faire?

(indice: parce qu’Hillary Clinton ou Manuel Valls sont des personnes encore plus insupportables que Donald Trump et Marine Le Pen)

« L' »élite », jadis associée aux possédants, aux grandes familles de l’industrie et de la banque, devient identifiée à une « nouvelle gauche » exagérément friande d’innovations sociales, sexuelles, sociétales et raciales. La perte d’influence du mouvement ouvrier au sein du parti démocrate et l’ascendant corrélatif d’une bourgeoisie néolibérale cosmopolite et cultivée n’arrangent rien. Les médias conservateurs, en plein essor, n’ont plus qu’à déchainer leur truculence contre une oligarchie radical-chic au parler exsangue et technocratique, lovée dans de belles résidences des États côtiers, touriste dans son propre pays, protégée d’une insécurité qu’elle conteste avec l’insouciance de ceux que la violence épargne. « Progressistes en limousine » là-bas; « gauche caviar » chez nous. La gauche parait de plus en plus associée à l’expertise, à la morgue, au cosmopolitisme, au mépris du peuple. Le piège s’est alors refermé; en mettant en veilleuse les questions de classe, les Démocrates ont enflé les voiles d’un poujadisme culturel qui les a balayés. En prenant pour cible l’élite de la culture, le populisme de droite a protégé l’élite de l’argent. Il n’y est parvenu que parce que la suffisance de ceux qui savent est devenu plus insupportable que l’impudence des possédants ».

louieJ’avoue tout, le titre de cet article était clairement putassier mais c’était pour vous attirer car en vrai je n’avais que deux livres à vous présenter. Par contre dans la série « regarde-ça et tu seras nettement moins con » il y la série de Louis ck, sobrement intitulée « Louie ». Pour les incultes Louis ck est un humoriste américain gros et roux qui a pour particularité a) de faire des blagues sur les pédophiles b) de s’auto-produire et de vendre les vidéos de ses shows pour la modeste somme de 5 dollars directement sur son site internet. Bon alors si vous aimez bien les blagues gentilles à la Gad Elmaleh, peut être que Louis ck ne vous fera pas rigoler. Mais si vous êtes hypocondriaque & déprimé le dimanche soir, alors cette série est pour vous. C’est une sorte d’auto-fiction dans laquelle alternent des bouts de spectacles de Louis avec des épisodes romancés de sa vie réelle d’homme de 40 ans divorcé. Comme cet épisode chez le médecin hinhin, avec le génial Ricky Gervais. C’est à la fois drôle, gênant et profond.

Allez à plus, et prenez soin de vous comme disent les youtube gourou.

17 commentaires
  1. Marie a dit:

    J’ai bien envie de lire Retour à Reims !Sinon je ne sais pas si tu as lu le dernier Christophe Guilly. Assez honnête et intelligent dans le genre.

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    • pas lu car j’ai ouï dire que Christophe G était de DROITE et que parfois je suis un peu sectaire (mais c’est vrai qu’il a l’air pas mal son bouquin, ça mériterait d’aller y fourrer sa truffe)

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  2. aubepine a dit:

    Patricia Kaas et le civet de sanglier c est très bien aussi. La première parce qu’elle vient de Forbach, l’une des villes les plus glauques de France que j’ai un peu connue, et rien que pour ça, j’ai un faible pour elle. Et le civet de sanglier, c est certes trop relou à cuire mais tellement bon!
    Bref, je te lis en rentrant du cinoch (merci patron, l’as tu vu?). Je note Thomas Frank et Christophe guilluy pour un de ces jours. En ce moment je repasse à la fiction, plus efficace pour se changer les idées. J’ai terminé hier « mademoiselle Haas » de Michèle audin : Le genre de bouquin que tu refermes en le gardant un moment entre les mains parce que c était vraiment bien et que t as pas envie de le reposer tout de suite (et ça parle des immigrés juifs polonais de Belleville!)
    Pour l’humour, j’ai prévu d’aller voir « blanche gardin », ça a l’air chouette.
    Sinon, tes tags me font toujours bien marrer!

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    • c’était bien merci patron? je ne l’ai pas encore vu mais il fait partie de ma liste secrète de films à voir ce mois-ci (même si F. Ruffin a tendance à me hérisser le poil parfois, comme quand il défend Daniel Mermet envers et contre tout où quand il affirme avec une grande décomplexitude (oui je parle comme Ségolène) qu’il ne paye pas de salaires pour les gens qui bossent pour Fakir… c’est un peu la gauche insupportable « pas grave de vivre pauvres car nous sommes engagés »)

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      • aubepine a dit:

        ça m’a bien plu mais en même temps, le ciné et moi c’est par intermittence (façon boulimique anorexique des salles sombres. en l’occurrence, j’avais pas vu grand chose ces derniers temps) (et puis je suis un peu picarde aussi. oui, je connais toutes les régions les plus sinistrées de France!). Et puis deux jours après je me suis retrouvée dans une petite réunion NPA (thème : réforme El Khomri). très intéressant (il va sans dire qu’il n’y avait aucun salarié dans le groupe) : parfois, je me demande si je ne suis pas,quand même, un peu de droite.
        et blanche gardin?

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      • ahhh je ne connaissais pas blanche gardin (je viens d’aller voir 2-3 vidéos, cette personne m’a fait glousser). Tu l’as vue en spectacle?

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      • aubepine a dit:

        J’y vais fin avril. j’ai lu plusieurs bonnes critiques qui m’ont donné envie mais je ne l’ai jamais vue sur scène.

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  3. Samar a dit:

    J’aime ton blog de tout mon coeur, tu es la Enjoyphoenix des blogs bouquins-humeur je te kiffe!
    Je suis absolument fascinée par la questions des classes sociales etc donc je viens de commander ces deux bouquins (t’aurais du coller un lien affilié, ma commande t’aurais rapporté 25 centimes)!
    D’ailleurs je mettrai bien dans cette liste le petit bouquin d’Alain Badiou « Notre mal vient de plus loin » sur les attentats du 13/11(et ses interviews par Mouloud Achour pour clique d’ailleurs #Mainstreambitch).

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  4. Tango a dit:

    Merci pour ces idées! Bien envie de lire Retour à Reims… Tu as déjà lu Annie Ernaux? Son texte sur l’avortement, L’événement, m’a fait une forte impression… Et j’ai aussi beaucoup aimé La femme gelée et L’Usage de la photo.

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    • Caroline a dit:

      Ah, Annie Ernaux, c’est exceptionnel aussi, je recommande fortement!

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      • Bin je vais faire ma relou mais personne ne m’écoute dans ce monde de sourds : JE TE L’AVAIS BIEN DIT qu’Annie Ernaux c’est vraiment bien!!! (c’est aussi la marraine spirituelle d’eribon. J’dis ça, j’dis rien mais au moins, au jeu des 7 familles, t’auras rassemblé la famille des écrivains bourdieusiens). Neanmoins, après lecture, le mystère reste total : pourquoi avoir CHOISI de s’installer dans une ville nouvelle. ???
        J’ai commencé par « La place ». Après, les autres (la plupart sont courts) se mélangent un peu tous dans ma tête, sauf celui sur l’avortement qui a un statut à part.
        Aussi (surtout) : merci pour le renvoi vers ma page, c est cool ;-))

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      • bon du coup je note l’avortement dans ma « liste de trucs que j’ai pas trop envie de lire mais qui a l’air bien quand même »
        un bon sujet pour le mois d’avril qui s’annonce 😀

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  5. ouais a dit:

    Lorsque les ouvriers syndicalistes ont été allègrement poussés par des arrivistes pros du syndicalisme vers leur fraiseuse et leur chaine de fabrication, on a coupé les membres de la gauche, la vraie!

    La politique du peuple ne peut être représentée et organisée que par le peuple qui marne chaque jour pour survivre et les jeunes qui comprennent très vite ce que sera leur futur. Elle n est peut être pas efficace ou réaliste sur le plan national, mais elle se déploie entre collègues épuisés après le repas de 20h00, entre amis de mauvaise fortune, entre inconnus de mauvais sort qui cherchent à comprendre et résister pour garder une certaine liberté et une dignité certaine, afin de faire céder la rigidité des entrepreneurs et des politiques bourgeois au pouvoir.

    Sans ce lien politique et syndicaliste ouvrier, ça me fait penser à Steinbeck, et dans cette société de consommation où chacun à quelque chose à perdre entre crédits, biens, et futures acquisitions un peu folles, l extrême droite rassure ces gens qui ont peur d être broyés par des entités invisibles mais réelles.

    Ils ont l air bien ces livres!

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    • C’est le premier commentaire que tu postes sans grogner (avec même une petite once d’approbation :D)
      Je suis content, je me fais une tartine de beurre de cacahuètes pour marquer ce jour d’une pierre blanche ^^

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